MCD #75 – Archéologie des média. France

MCD #75 – Archéologie des média. France

L’archéologie des média est quasiment inconnue en France, bien qu’elle ait plus de vingt d’existence. Pourtant, elle a produit (et continue de produire) des effets majeurs dans le champ de la création, de l’exposition, de la médiation, de la conservation et de la théorisation des œuvres médiatiques et numériques. Héritant d’esprits indisciplinés deMarshall McLuhan, de Michel Foucault et de Friedrich Kittler, l’archéologie des média est multiple, inter- et a-disciplinaire. Le numéro MCD #75 sera à son image. 

Pour la première fois, MCD confie la direction d’un numéro à une école d’art. Au croisement de la création et de la conservation-restauration, l’École Supérieure d’Art d’Avignon, et en particulier le laboratoire PAMAL (Preservation, Archaeology, Media Art Lab), entre en dialogue, dans un esprit de questionnement et de diversité, avec ce courant atypique de la pensée d’aujourd’hui, qui interroge principalement la temporalité et la matérialité des média.

Emmanuel Guez 

 

RETOUR VERS LE FUTUR

Nos premiers ordinateurs sont désormais au musée. Et nous sommes effarés par les faibles capacités de ces machines, avec leurs écrans cathodiques noirs et verts, qui ont symbolisé le futur immédiat dans les années 80/90. Comparées à celles de nos smartphones à écrans tactiles, leurs possibilités techniques et créatrices nous semblent bien dérisoires. Il en sera de même pour tous les artefacts électroniques de ce début du XXIe siècle. Et après, également. C’est une histoire sans fin qui ne fait que commencer.

C’est pour cela qu’il est temps de regarder en arrière. De contempler ces machines reléguées dans les oubliettes du passé qui ont permis à des pionniers, mi-artistes mi-techniciens, de défricher de nouvelles formes d’expression, de création. De faire en sorte que leurs réalisations demeurent visibles, perceptibles, au-delà des contraintes techniques, malgré le fait que leur environnement technologique soit en voie de disparition.

Faire en sorte que cette mémoire encore un peu vive ne devienne pas une mémoire morte… C’est à ce travail de mémoire — mémoire technique et mémoire artistique — que nous convie Emmanuel Guez, rédacteur en chef invité avec l’École Supérieure d’Art d’Avignon, au travers de ce numéro.

Un travail d’archéologie car il s’agit bien de mettre au jour, en lumière, des protocoles Internet oubliés, de l’électronique ancienne, des vieux pixels aux couleurs incertaines, etc., à une époque où l’on ne cesse de mettre à jour, dans l’urgence renouvelée, des logiciels pour des appareils à l’obsolescence programmée. Un travail de conservation pour éviter que l’art numérique ne se « fossilise » comme la fameuse et énigmatique pile électrique de Bagdad…

Un travail de passeur pour éviter que nos machines et nos créations ne deviennent incompréhensibles aux générations à venir; à l’image récente de ces enfants et adolescents « 2.0″ complètement déroutés par l’utilisation d’un walkman ayant appartenu à leurs parents… Ce qui relativise par ailleurs la portée du design appliqué et/ou des fonctions supposées intuitives. Mais c’est une autre histoire…

Laurent Diouf
Rédacteur en chef

 

MCD remercie tout particulièrement Emmanuel Guez, les enseignants et les étudiants de l’École Supérieure d’Art d’Avignon qui ont participé à la rédaction de ce numéro.

Au sommaire :
ARCHÉOLOGIE  / RECYCLAGE / VINTAGE / EXPOSITION  / MÉDIATION / ÉCOSYSTÈME / CONSERVATION  / PRÉSERVATION / INGÉNIERIE

Les contributeurs de ce numéro :
Andrés Lozano, Anne Laforet, Annick Bureaud, Annick Rivoire, Cécile Dazord, Christophe Bruno, Clarisse Bardiot, Coline Bourgouin, Emmanuel Guez, Emmanuel Guy, Gwenola Wagon, Igor Štromajer, Jussi Parikka, Laura Garrassin, Line Herbert-Arnaud, Lionel Broye, Lucille Calmel, Marie Bastard, Morgane Stricot, Pierre Lagrange, Prune Galeazzi, Rémy Geindreau, Serge Hoffman, Sylvain Goutailler, Tiphaine Vialle.